samedi 18 juillet 2015

Remarques liminaires

Avant de vous lancer dans un premier rasage, voici quelques dispositions à prévoir :

Du temps à soi. Se raser à la mode de nos grands-pères, c’est aussi choisir de prendre son temps, de refuser d’être pressé, d’être tranquillement présent à ce que l’on fait. J’ose rapprocher cette démarche des principes de la pleine conscience des bouddhistes : amener son entière attention sur le moment présent du rasage, y être pleinement consacré, sans être parasité par la contrainte du temps qui file ou par les soucis de la journée qui vous attendent.

Statue du Bouddha
Rasez-vous en paix.

Bref, prévoyez de vous réveiller plus tôt et d’avoir la salle de bains à vous seul pendant une demi-heure. (Je prévois large, mais c’est à dessein, justement afin que le temps ne compte pas.)

De la prudence. Vos débuts seront plus ou moins satisfaisants (cette fameuse learning curve dont j’ai parlé précédemment) : votre cou pourrait ressembler à celui d’un poulet que l’on vient de plumer… Ainsi, tant que vous n’avez pas atteint un degré minimal de maîtrise, évitez le rasoir de sureté le jour d’un entretien d’embauche ou d’un rendez-vous galant.

Une exploration indispensable. Préparez votre premier rasage en explorant avec attention les poils de votre barbe : dans quel sens poussent-ils ? Du haut vers le bas ? Du bas vers le haut ? Où et comment précisément ? Chacun a sa pilosité et ses particularités, il est crucial de bien les connaître.

Sens des poils de la barbe
Prenez le temps de connaître votre barbe.


Des jeux de mousse. La qualité de la mousse est déterminante : une excellente mousse résoudra d’emblée 80% des problèmes ! Je vous suggère donc de travailler des mousses dans un grand bol : avec plus ou moins de savon, plus ou moins d’eau. Une noisette de crème suffit largement (si vous avez un savon dur, on chargera le blaireau mouillé en effectuant un certain nombre de tours sur le savon avant de le travailler dans le bol). Regardez ce qui se passe, touchez, étalez sur votre main. N’hésitez pas à recommencer : tant pis si vous gâchez, prenez ça comme un investissement. Essayez d’obtenir une mousse ferme, riche, dense, mais qui reste souple, onctueuse et garde du volume. Si la mousse ne tient pas et si les petites bulles sont trop visibles, c’est qu’il y a trop d’eau. Si au contraire vous obtenez une pâte épaisse, alors ajoutez de l’eau.

Blaireau plein de mousse

jeudi 9 juillet 2015

A steep learning curve

On utilise en anglais l’expression learning curve (courbe d’apprentissage) pour indiquer ces situations où la maîtrise d’une technique passe par un travail de patience, d’humilité et de ténacité.

C’est le cas du rasage au rasoir de sureté : on n’atteint une belle réussite de rasage qu’au bout d’un cheminement, exaspérant parfois, qui s’inscrit dans le temps.

la learning curve du rasage à l'ancienne


C’est cette courbe d’apprentissage que le rasoir multi-lames avec bande lubrifiante, lamelles souples et autres bidules aussi onéreux que brevetés s’efforce de court-circuiter (et y parvient d’ailleurs souvent). Et dans le cas du rasoir électrique, il n’y a même pas de learning curve du tout : il n’y a ni débutant ni confirmé, tout le monde est d’emblée à égalité.

Dès lors, s’il existe des solutions presse-bouton, pourquoi s’embêter ? Eh bien justement parce que la satisfaction peut se trouver autant dans le chemin que dans son aboutissement, parce que le fait même de se raser peut être un bonheur ou une corvée selon la voie que l’on choisit.

Si vous ne voulez pas apprendre, prendre du temps, vous tromper, recommencer, douter, progresser, réussir, etc., alors Philips et Braun ont conçu pour la multitude d’admirables rasoirs électriques : c’est ce qu’il vous faut.

Si en revanche vous vous faites une joie d’emprunter quotidiennement les méandres de la learning curve, alors vous êtes fait pour ces vieux instruments du rasage à l’ancienne.

Je tenais à vous prévenir avant que vous ne vous lanciez : si ce n’est pas si difficile, ce n’est pas non plus évident et immédiat. Cela se mérite.

Je voulais aussi vous conseiller de prendre le temps d’apprendre avec le matériel qui est le vôtre et de ne pas en changer avant de savoir vous raser vraiment correctement. On n’acquiert pas la maîtrise d’un geste technique en modifiant les paramètres chaque jour. J’ai utilisé mon Merkur 34c quotidiennement pendant quatre ans avant d’essayer un vieux Gillette monobloc. Sans forcément attendre quatre ans avant de varier les plaisirs, il me semble qu’utiliser les mêmes matériels (rasoir, blaireau, savon et lames) pendant plusieurs mois est le meilleur moyen d’acquérir un geste sûr.

Nous verrons dans les prochains articles comment s'y prendre.

lundi 6 juillet 2015

Le matériel de rasage du débutant

Je me propose dans cet article de vous conseiller si, curieux de découvrir le rasoir de sureté, vous vous demandez quels matériels acquérir.

Puisqu’il s’agit a priori seulement d’essayer, je pourrais vous orienter vers les instruments les moins chers, afin de vous inviter à franchir le pas à moindre coût. On trouve en effet des rasoirs de sureté neufs à 1,59 € sur eBay, et des blaireaux à 1,88 € !

Rasoir et blaireau bas de gamme
Fuyez la camelote à vil prix !


Peu chers, certes, mais pour quelle expérience ? À quoi bon quitter la pacotille en plastique du supermarché et les mousses en bombe, si c’est pour retrouver chaque matin entre ses doigts des objets tristes, bas de gamme et éphémères ?

Je prends donc le parti de vous guider d’emblée vers des matériels pérennes et d’excellente qualité, tout en restant largement sous la barre des 100 €. Dans le pire des cas, si vous étiez déçus, vous pourriez revendre vos achats en les proposant sur un forum, eBay ou Le Bon Coin.

Commençons par le rasoir. On évitera les modèles à peigne ouvert (souvent agressifs) ou à barre oblique (slant en anglais, et plutôt destinés à l’utilisateur confirmé). Je déconseille par ailleurs pour débuter un rasoir ancien acheté d’occasion dans une brocante ou découvert dans un grenier : vous pourriez tomber sur du matériel médiocre ou présentant des défauts consécutifs à l’usure ou à des chocs. Autant se lancer avec un rasoir impeccable.

Sans originalité, je conseille deux rasoirs souvent recommandés sur les forums pour les débutants :

  • le Merkur 34c, dit aussi Merkur HD, qui est un rasoir d’agressivité moyenne, d’utilisation facile (deux pièces métalliques et c’est tout), pour un prix d’environ 40 €,

Merkur 34c ou HD
Merkur 34c, dit aussi Merkur HD




  • le Mühle R89, un grand classique lui aussi, assez peu agressif, à la finition plus raffinée que le Merkur. Il existe une variante à manche long. Avec une tête parfaitement identique, on a le Edwin Jagger DE89, souvent moins cher que le Mühle (compter environ 35 € pour le Mühle et 30 € pour le Edwin Jagger). Le choix entre le R89 et le DE89 est avant tout une question de goût : cela revient à choisir le manche.


Mühle R89
Mühle R89


Ma préférence va au Merkur 34c plutôt qu’au R89/DE89, mais c’est très subjectif : le 34c est mon premier rasoir de sureté et revêt donc une valeur affective particulière. Le Mühle n’en est pas moins magnifique et efficace.

Pour le blaireau, les modèles avec les poils en fibres synthétiques ont plusieurs avantages : ils sont durables, résistants, efficaces, faciles à utiliser, sèchent vite et coûtent relativement peu cher. Je conseille :

  • les blaireaux Black Fibre ou Silvertip Fibre de Mühle qui sont aussi efficaces qu’abordables (grand choix de modèles entre 20 et 50 €),


Blaireau Mühle en fibres synthétiques Black Fibre
Brosse Mühle Black Fibre


  • les brosses du français Plisson (35 € pour le Maison du Barbier, 50 € pour le Plisson Access et au-delà de 200 € avec de luxueux manches).

Plisson fibres de chez l'Occitane
Plisson fibres (vendu dans les magasins l'Occitane)



Pour le savon (ou la crème), on trouve à petit prix des produits très efficaces :

  • la crème Palmolive (senteur un peu citronnée) ou la Nivea que l’on trouve en supermarché pour quelques euros. Il y a aussi les crèmes  Williams qui procurent un bonne glisse.


Crème à raser Palmolive
Crème à raser Palmolive



  • le savon assez mou Proraso, qu’il faudra commander. Attention, le Proraso vert dégage une odeur de menthol et d’eucalyptus forte, que l’on peut adorer ou non… On peut lui préférer le modèle blanc, au thé vert, ou le bleu à l’aloe vera (et qui sent… l’aloe vera, pas désagréable, mais très particulier).

Savon à raser Proraso vert
Savon italien Proraso vert : une référence chez les barbiers



Enfin, pour les lames, on trouve facilement les Gillette Bleue Extra, qui sont ce qu’il y a de mieux en supermarché ou en épicerie. Si vous commandez, je recommanderais au débutant les lames Astra Superior Platinum, les Derby ou les Shark, à la fois douces, permissives et économiques. On évitera les lames Merkur, fréquemment décriées, ou les Feather (d’un tranchant inégalé, mais qui pardonnent peu le geste maladroit du débutant).

lames Astra superior platinum
Lames Astra superior platinum


Où faire ses achats ? Si plusieurs produits se trouvent en supermarché, vous devrez le plus souvent effectuer des commandes sur internet. Certains fabricants ont une boutique en ligne (par exemple Mühle ou Plisson), mais il existe surtout des magasins qui proposent toutes sortes de marques (Rasage classique, Shaving.ie, Gifts and Care, etc.)